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Benchmarking IE

Benchmarking des pratiques de l’Intelligence économique

By 28 décembre 2007janvier 24th, 2023No Comments
plateformes d'intelligence économique
Quelles sont les meilleures pratiques de l’Intelligence économique ? Voici un extrait de la thèse professionnelle de Jérôme Bondu, portant sur un « benchmarking des pratiques de l’intelligence économique » (voir ci-dessous les descriptions d’entreprises).  Retrouvez les prestations d’Inter-Ligere : conseil en organisation de système de veille, formations en intelligence économique, et publications.
Vous trouverez ci-dessous la synthèse et la conclusion.

Synthèse du benchmarking des pratiques de l’intelligence économique

Impulsion d’une dynamique d’intelligence économique

L’impulsion de faire de la veille peut venir de la prise de conscience que ne pas en faire nuit à la compétitivité de l’entreprise. C’est le cas pour quelques entreprises du panel (par exemple l’entreprise H) dont la veille concurrentielle a été demandée par le PDG, suite à une déconvenue commerciale.
Dans plusieurs entreprises, la mise en place d’une veille coïncide avec l’arrivée d’un PDG, ou d’un haut responsable, sensibilisé à cette démarche (entreprises B, I, L, U, Y).

Implication de la direction dans les pratiques de l’Intelligence économique

L’idéal est bien sûr que l’effort de veille soit supporté au plus haut niveau de l’entreprise.
Pour nombre de grosses entreprise, le responsable veille est en n-2 ou n-3 du PDG.
Dans des structures plus petites (entreprise A) le responsable peut être directement lié au PDG.

Implication du personnel

Très peu d’entreprises font des formations en IE pour leurs employés (a part quelques entreprises, comme B ou R). Souvent ce sont des employés à certaines fonctions qui sont sensibilisés. A ce titre, l’entreprise G a réussit à impliquer fortement les commerciaux (détails plus bas).

Structure

L’entreprise B a un système très intéressant de remontée des informations. L’entreprise est installée sur les 5 continents et propose plusieurs produits.
Le système de collecte des informations est une superposition de différents filets : Filet régionaux. Chaque région (EU, Europe, Asie) dispose de son système de veille. Filet par produit. Chaque produit dispose lui aussi de son système de veille. Filet par concurrents. Chaque concurrent est suivi par un veilleur au niveau monde.
Ainsi l’information utile peut être capturée par chacun des différents filets. Toutes les informations convergent vers la DG. L’entreprise V présente une organisation similaire.

Coordination des pratiques de l’Intelligence économique

Il n’y a généralement pas de coordination entre les différentes structures de veille, ce que déplorent beaucoup de mes interlocuteurs. C’est d’ailleurs un des point sur lesquels insistent les théoriciens de l’intelligence économique. La coordination permet de mutualiser les effort de veille au sein l’entreprise.
Quels sont les avantages d’une coordination ?
Cela peut permettre d’échanger et généraliser les bonnes pratiques. Cela permet aux acteurs de la veille de se connaître, et créer un esprit de corps dans un domaine qui est relativement peu connu de l’ensemble des acteurs de l’entreprise.
Sous quelles formes cette coordination peut s’opérer ?
Cela peut prendre la forme de réunions mensuelles. Par exemple portant sur la mise en place d’outils informatiques de gestion des information, comme dans l’entreprise H.
Un contact entre veilleurs peut déjà se faire via une liste de diffusion interne voir un intranet commun, comme pour l’organisme R.
Certaines entreprises ont dit avoir eu des difficultés à coordonner les structures de veille pour des raisons de rivalités entre les entités de veille. Etre à la tête d’une structure de veille permet d’être alimenté en information. Or si une coordination se met en place, il y a un risque de perdre cette prérogative.
C’est sans doute en connaissance de ces difficultés que des entreprises, qui tentent de mettre en place une coordination, accordent beaucoup d’importance à l’aspect relationnel et humain, pour ne pas soulever de réticences.

Effectifs

La veille repose souvent sur une personne (ou une équipe) qui anime un ensemble de capteurs d’information.
L’entreprise B étonne pour le nombre très important d’employés impliqués dans la veille (l’équivalent de 100 personnes à plein temps). Mais cela est à rapporter à la taille de l’entreprise.
L’entreprise O fonctionne différemment. Les veilleurs (trois personnes seulement !) sont intégrés à des projets. Charge à eux de constituer et d’animer une équipe veille (d’environ dix personnes) au sein de ce projet. Chaque veilleur démultiplie ainsi sa force de travail, en même temps qu’il initie ses correspondants, et assure une totale adéquation entre les « besoins » en terme de veille du projet, et les « services » apportés par la veille.

Détection des besoins

La détection des besoins est l’étape fondamentale (s’il en est) du processus de veille. Elle conditionne l’ensemble du cycle qui va être opéré. Selon l’attention qui y est portée, on peut déjà apprécier la qualité de la dynamique d’intelligence économique dans l’entreprise. Que le service de veille décide seul (en autarcie) des sujets qu’il va traiter, ou que les veilleurs soient intégrés au processus de création des produits, et l’on en sait déjà beaucoup sur la volonté de l’entreprise de mener une veille active ou non.
Cela est bien sûr à relativiser selon la place du service de veille dans l’entreprise : direction fonctionnelle ou opérationnelle ?
La veille dans une direction fonctionnelle (Recherche et Développement, Stratégie?) aura plutôt pour fonction de renseigner la direction concernée. C’est d’elle que doit venir les demandes, à l’image du cabinet de direction de l’entreprise M.
La veille dans une direction opérationnelle aidera à la conception, au positionnement voir au développement des produits. Les comptes rendus A, S et O présentent des cas intéressants où la veille est réellement en appui à la création des produits. L’intégration au projet est totale.

Utilisation de la source brevet

Les brevets sont une source d’information tout à fait intéressante, mais difficile à manier. Il existe des techniques de désinformation s’appuyant sur les brevets. Une d’entre elles consiste à émettre une quantité de breve
t dans un domaine pour focaliser l’attention des concurrents sur ce domaine et faire écran sur des recherches dans d’autres domaines. L’entreprise E mène une recherche sur les moyens d’optimiser l’utilisation des brevets.

Utilisation d’internet

Je place Internet ni dans les sources formelles, ni dans les sources informelles. On y trouve aussi bien des document écrits (livres, rapports?) que des conversations (forum de discussions?).
Internet est en même temps support (les sites web sont créés pour ce média) et un outil qui permet d’accéder à des sources (livres, revues?).
Les bases de données professionnelles sont indispensables. L’entreprise B les place comme source d’information majeure.
Très peu d’entreprises utilisent des outils informatiques spécifiques de veille. Les raisons les plus souvent avancées sont relatives à leur coût et à la difficulté de les utiliser. Néanmoins, beaucoup d’entreprises restent attentives à l’évolution de ces outils (L, O?).

Sources informelles dans les pratiques de l’Intelligence économique

La participation à des colloques, congrès, conférences,?, doit donner lieu à un travail de collecte rigoureux, proportionnel à la quantité d’information que l’on peut en retirer. L’entreprise E commence le travail de collecte à partir de la détection des manifestions auxquelles participer. La recherche des interlocuteurs à rencontrer, la mise au point des questions à étudier, sont traités avant la manifestation. Après la manifestation, un compte rendu est produit et diffusé.
L’organisme R pousse assez loin la gestion des contacts que les experts peuvent avoir en déplacement. A chaque retour de mission, ils doivent établir un compte rendu détaillé. Cela permet à la cellule de veille d’établir des profils de carrière pour des acteurs à suivre.
Les commerciaux, en contact avec la clientèle, doivent être impliqués dans le processus de collecte des informations. L’entreprise G est la plus avancée dans ce domaine. Les commerciaux sont formées à la veille. Tout est fait pour leur faciliter la tâche pour remonter les informations collectées.
Chaque information collectée peut être remontée sous différents canaux (mails des veilleurs, base de donnée dédiée, téléphone?) à disposition du commercial.
Un bulletin d’information leur est spécifiquement envoyé compilant les informations reçues. Ceci est une source d’information très appréciée de ces derniers pour se tenir au courant des produits des concurrents (auxquels ils sont naturellement confrontés).
Ils sont valorisés pour leur aide au travail de veille de différentes manières, notamment par une lettre de remerciement de la direction, avec copie à leur supérieur hiérarchique direct. De plus ils reçoivent des bons d’achat.
Il est certain de ce type d’incitation peuvent induire des remontées d’information intéressées, comme le fait remarquer certaines entreprises qui voudraient pouvoir trouver une autre solution.

Déontologie dans l’utilisation des sources

Aucun de mes interlocuteurs ne m’a dit utiliser des sources noires*.
De l’avis de quelques-uns uns d’entre eux, l’intelligence économique ne s’intégrera pas au monde de l’entreprise tant que cela sera connoté « guerre économique » et « monde du renseignement ». Bien que les problématiques de l’intelligence économique et du renseignement soient proches, l’amalgame est dangereux.
Certains avancent même que l’IE aurait tout intérêt à faire rentrer en son sein des généralistes, et des personnes issues des sciences humaines : l’histoire pour l’approche stratégique inhérente à cette discipline, psychologie pour la connaissance de l’âme humaine, journalisme pour la science de l’investigation et de la diffusion d’information? sans parler des documentalistes qui sont des veilleurs qui s’ignorent.

Information source de pouvoir

Il n’est pas aisé de mettre en place une dynamique de veille en entreprise. La veille repose sur le partage des informations, or l’information est source de pouvoir, et les employés sont réticents à la partager.
Vouloir leur faire accepter cette idée de partage, s’ils considèrent que c’est une dilution de leur pouvoir est une gageure. Et beaucoup de discussion tournent autour de ce constat.
Donner de l’information sans rien en retour, est en effet une perte de pouvoir. Mais donner (ou plutôt partager) pour en recevoir plus, est un accroissement de pouvoir.
L’objectif de la veille est de faire comprendre qu’ils gagnent du pouvoir à la partager. Car ce qu’ils donnent, ils vont le recevoir démultiplié. Ils vont rentrer dans un réseau où l’information transite, et dans lequel ils peuvent « piocher ».

Traitement de l’information

Les experts doivent participer au traitement des informations.
L’entreprise E est un organisme de mutualisation des activités de recherche et de développement, qui compte près de 300 experts. Le traitement des informations fait largement appel à cette richesse. Cela fait partie de la mission de ces experts que d’être en appui aux ingénieurs de l’entreprise.
De nombreuses entreprises ont sur l’intranet un site qui recense les experts « maison » (domaines de compétences, photo, coordonnées?), ce qui offre à tout employé la possibilité de les contacter.

Diffusion de l’information

L’intranet du service de veille peut se révéler un outil de diffusion des informations tout à fait puissant.
Le service de veille informatique de l’entreprise C a construit un intranet qui a une forte audience. D’abord le site est très esthétique et tout à fait fonctionnel. Il est accessible directement depuis la première page de l’intranet général. En outre, le service émet régulièrement des « nouvelles » qui sont elles aussi accessibles depuis la première page de l’intranet général. Tout ceci contribue à faire que ce site soit très visité. Des indicateurs permettent de mesurer le nombre de connexion.

Capitalisation

Il n’y a pas de solution ou d’outil miracle en terme de capitalisation des informations. La grande majorité des entreprises sont en période, au mieux de test, sinon de réflexion à ce sujet.
Conserver dans une grande base de donnée, accessible via l’intranet, les documents utiles permet de résoudre les questions élémentaires des employés. L’étape suivante étant que les employés eu
x-mêmes aillent chercher les informations dont ils ont besoin dans cette base, sans passer par le service veille, qui pourrait alors se concentrer sur les questions complexes.
En ce qui concerne plus spécifiquement la capitalisation des documents issus du travail de veille : si beaucoup d’entreprise travaillent à leur conservation, une voix discordante ? et par la même intéressante – fait valoir qu’un document de veille n’a pour but que de renseigner dans le cadre d’une situation spécifique, un à moment donné, pour une prise de décision particulière. Ce genre de renseignement est très contextualisé et est peu transposable. Cette personne n’accorde donc pas beaucoup d’importance à la sauvegarde des documents de veille. Il s’agit bien sûr de documents très opérationnels.
Cette prise de position a retenu mon attention car elle s’inscrit en faux par rapport au mouvement actuel, qui prône la conservation de tout document, sous prétexte que les avancées technologiques récentes le permettent?

Mise en place d’indicateurs et valorisation de l’activité de veille

Peu d’entreprises ont mis en place des indicateurs pour mesurer l’activité de veille (performance, image de la veille?). En général, les systèmes de veille les mieux intégrés et les plus affirmés n’en développent pas (voir le contre exemple du compte rendu K). L’argument avancé est que se justifier, c’est déjà d’une certaine manière remettre en cause son existence.
Mais parallèlement, il y a unanimité pour dénoncer le manque de valorisation de cette activité même pour les systèmes les plus importants (entreprise B).

Importance du facteur humain dans les pratiques de l’Intelligence économique

S’il est un point qui fait l’unanimité entre tous mes interlocuteur, c’est bien la place du facteur humain dans la veille. Que ce soit au niveau de la détection des besoins, de la collecte, du traitement ou de la diffusion des informations?, la qualité du travail effectué est fortement fonction de la qualité humaine des veilleurs.
La détection des besoins est une étape cruciale. La veille qui ne répond pas aux questionnements de l’entreprise risque de ne travailler que pour elle. Les veilleurs doivent être à l’affût des besoins de l’entreprise. Les systèmes qui permettent la remontée des besoins (par mail, ou via un canal spécifique) ne sont alimentés que parce que cette fonction est connue. Souvent, quand une demande est formulée, c’est à un personne en particulier qu’elle est exprimée, et non au service de veille, organe inconnu de la majorité des employés.
Ceci est encore plus vrai pour la collecte des informations. Si une large place est faite à l’outil informatique, qui est actuellement en période de gestation, de positionnement, tous s’accordent à dire que l’information qui en est issue est riche en volume et pauvre en qualité. L’information grise, rapportée par les capteurs de l’entreprise est au contraire à très forte potentialité.
Le facteur humain joue tout son rôle dans le traitement de l’information. Les réunions entre veilleurs ou entre membres d’un même projet sont toujours l’occasion d’échanges fertiles. Le management des réunions est une discipline cruciale. Un directeur de la veille technologique a été jusqu’à se demander s’il ne faudrait pas intégrer des psychologue dans les réunions de veille.

Conclusion du Benchmarking des pratiques de l’Intelligence économique

Cette étude sur les « pratiques de l’Intelligence économique » avait pour but d’améliorer la connaissance sur les pratiques de veille telles qu’elles sont réellement pratiquées au sein des entreprises.

Nul doute que l’organisation de certaines entreprises retiendra l’attention des lecteurs.
Si une entreprise qui a participé à cette étude comparative veut rentrer en contact avec une autre entreprise pour mener plus avant le benchmarking, il va de soi que je pourrai les mettre en relation.
Cette étude a bien sur été extrêmement enrichissante. Outre la connaissance de nombreuses structures de veille et d’intelligence économique, j’en retire deux convictions :
La première est que c’est un domaine difficile. Le métier est peu valorisé. Il apparaît pour les meilleurs comme ingrat, car ils ne font qu’apporter les éléments à d’autres qui « prennent les décisions »? Le métier est difficile, car gérer l’information source de pouvoir, provoque au mieux réticence, au pire méfiance. C’est un domaine où il faut rester humble, car il est difficile de mesurer l’effet du travail réalisé.

Mais malgré cela, deuxième conviction, c’est un métier qui passionne ceux qui le pratiquent ! Tous me l’ont affirmé. Ils aiment ce qu’ils font, et « portent » leur travail. C’est un domaine complet, transverse et à l’apprentissage permanent.

Liens vers les descriptions des pratiques dans 23 entreprises

  1. Description de l’entreprise A
  2. Description de l’entreprise B.
  3. Description de l’entreprise C.
  4. Description de l’entreprise D.
  5. Description de l’entreprise E.
  6. Description de l’entreprise H.
  7. Description de l’entreprise I.
  8. Description de l’entreprise J.
  9. Description de l’entreprise K.
  10. Description de l’entreprise M.
  11. Description de l’entreprise N.
  12. Description de l’entreprise O.
  13. Description de l’entreprise P.
  14. Description de l’entreprise Q.
  15. Description de l’entreprise R.
  16. Description de l’entreprise S.
  17. Description de l’entreprise T.
  18. Description de l’entreprise U.
  19. Description de l’entreprise V.
  20. Description de l’entreprise W.
  21. Description de l’entreprise X.
  22. Description de l’entreprise Y.
  23. Description de l’entreprise Z.

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Jérôme Bondu

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