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CR : Internet participatif, conférence de Pierre Bellanger

By 29 juin 2008avril 22nd, 2023No Comments
Internet participatif

L’internet participatif est aussi intelligent que le cerveau d’une mouche !!  Derrière cette affirmation un peu provoquante, il y a une réalité numérique (au sens de nombre). Internet connecte 1 milliard d’ordinateurs. Tout comme le cerveau de la mouche connecte un milliard de neurones. Au delà de ce clin d’œil, on peut se demander ce qu’apporte l’internet participatif ? Quels en sont les bénéfices, mais aussi les utopies ?

La révolution et les bénéfices de l’Internet participatif

Quelques idées sont reprises d’une conférence entendue récemment au Club des Vigilants de Pierre Bellanger, fondateur de Skyrock (2).

  • La véritable révolution de l’internet n’est pas dans la diffusion mais dans l’échange entre personnes.
  • La diffusion est bien sûr importante, mais elle amplifie une tendance en cours.
  • Par contre, la possibilité pour tous de s’exprimer sur un pied d’égalité est par contre un véritablement bouleversement aux impacts sociologiques importants.

Internet est un multiplicateur d’émancipation individuel

  • Car il permet à chacun de s’exprimer.
  • Cela permet de confronter ses idées. D’exposer ses frustrations, et donc de s’apaiser (même si on trouve le pire derrière certains messages anonymes protégés par un pseudo).
  • Pour ceux qui écrivent un tant soit peu consciencieusement dans les médias participatifs (type www.agoravox.fr) cela oblige à vérifier les idées que l’on veut exposer. Cela permet de progresser par la lecture des remarques des autres. Cela permet de progresser car le sujet abordé reste vivace, et les lectures que l’on fait par la suite sont plus attentives.
  • Sur internet il n’y a plus de minorité. Quelque soit la position que l’on adopte, on peut trouver une foule d’individus qui pensent de même. L’individualisme se vit en réseau.
  • L’internet participatif remet en cause les détenteurs d’autorité et du savoir, et les « challenge ».
  • C’est un séisme d’une magnitude égale à l’invention de l’imprimerie et à l’alphabétisation.

Internet modifie certains aspects du business

  • Les marques ont perdu la maîtrise de leur visibilité et notoriété. J’ai souvent entendu dans les conférences sur le Web2.0 « qu’un anonyme qui annonce une mauvaise nouvelle est plus crédible qu’un institut officiel qui en dit une bonne ».
  • Conséquence inattendue, certaines entreprises cherchent à impliquer leurs salariés : Ainsi des compagnies qui ont bien compris cette dynamique, ont eu le mot d’ordre vis à vis de leurs collaborateurs « d’ouvrir des blogs » (à condition -bien sûr- de ne pas dire du mal de l’entreprise !). L’impact de 10 000 employés qui parlent de leur entreprise en termes positifs est énorme, et largement plus important que des plaquettes institutionnelles.

Internet influe sur la publicité

  • La publicité se démassifie. On ne recherche plus à découper la population en catégories (âge, CSP, …) mais on travaille au niveau de l’individu. Ainsi il est possible de charger les bannières publicitaires selon le comportement de surf de l’internaute.
  • Une des conséquences inattendue est qu’il y a un refus de la part des jeunes (plus habitués à l’internet qu’à la télévision) de la publicité par interruption (comme à la radio ou la télévision). Sur internet la pub n’empêche pas le surf.

L’utopie de l’Internet participatif

Des contres arguments peuvent être trouvés dans le livre « Le Culte de l’amateur », d’Andrew Keen (3). Ce dernier y dénonce l’utopie de l’Internet participatif.

Pierre de Gasquet dans un article des Echos (4), résume la thèse de Keen comme suit : « Fruit perverti de l’imagination d’« anciens hippies californiens romantiques et naïfs », la vogue de l’Internet participatif menace de tirer vers le bas notre culture en encourageant le plagiat, le verbiage, la superficialité ou la pornographie extrême… Loin de participer à la démocratisation de la culture, la fameuse révolution Web 2.0 et ses avatars (YouTube, MySpace, Facebook…) serait en train de « tuer notre culture, prendre d’assaut notre économie et détruire nos codes de conduite ». Quant au noble concept de « journalisme citoyen », il participe pleinement de ce mythe de l’amateurisme triomphant, où la sagacité du « citoyen expert » relègue les médias traditionnels au rang d’antiquités paléochrétiennes. C’est un simple leurre destiné à appâter les masses manipulables à merci. » L’auteur développe deux exemples.

D’abord pour stigmatiser la manque de culture de l’internet.

  • « A elle seule, Wikipedia, l’encyclopédie en ligne participative, créée en janvier 2001 par Jimmy Wales et Larry Sanger, est considérée par Andrew Keen, fervent partisan de son modèle rival vertueux Citizendium, comme le vecteur de désinformation par excellence. « En tête des recherches mondiales, elle n’a pas plus de valeur qu’un «Trivial Pursuit», avec plein d’erreurs et de demi-vérités ». La mise au point par un étudiant américain, Virgil Griffith, d’un logiciel (Wikiscanner) permettant d’identifier les manipulations ou modifications de biographies sur Wikipedia (et qui a permis de repérer certaines opérations de « nettoyage ») semble lui donner raison. »
  • Mais ce manque de culture est bien réel. Il est présent dans la société. Internet ne fait que le révéler. Est-ce que casser le thermomètre est un bon remède pour combattre la maladie ? Faut-il dénier le droit aux moins cultivés d’accéder à cet outil ? Cette idée me semble dangereusement élitiste.

L’autre exemple sert à prévenir des miroirs aux alouettes des entreprises de la nouvelle économie.

  • Avec ces milliards de dollars « la capitalisation boursière de Google, premier site mondial de recherche sur Internet, qui tire 99 % de ses ressources de la vente d’espaces publicitaires, est-elle vraiment justifiée, s’interroge aussi le pourfendeur du Web 2.0 ? « A la différence de Time Warner ou Disney, qui produisent des films, de la musique, des magazines et de la télévision, Google est un parasite qui ne crée aucun contenu propre. » Son principal mérite est d’avoir inventé un algorithme qui permette de relier des contenus préexistants en faisant payer les annonceurs chaque fois que l’on clique sur un lien. Le degré zéro de la création de valeur en quelque sorte. »
  • Le journaliste des Echos continue ainsi « Le pamphlet d’Andrew Keen a au moins le mérite de contester l’idée agaçante que l’immédiateté et la gratuité priment forcément sur la fiabilité de l’information. Tout en encourageant les médias dits « traditionnels » à ne pas renoncer à leurs standards de qualité face à la vogue du participatif. »

Pour finir, il me semble qu’Internet n’est qu’un révélateur

Révélateur d’une perte d’orthographe peut être, d’une baisse de la culture générale, sans doute ? Est-ce par ce qu’il révèle des choses peu flatteuses sur notre société qu’il faut blâmer l’outil ? Pour reprendre un dicton connu « Ce n’est pas en cassant le thermomètre que l’on peut guérir la maladie. »

Au contraire, je suis de ceux qui pensent que les vertus de l’expression (qu’elle soit orale ou écrire) sont supérieures aux désagréments engendrés.

Et il faut savoir que les mouches sont des insectes très intelligents 😉

Références complémentaires

(2) Le site de la radio Skyrock cumule les performances. Il est :

  • 1er réseau social mondial francophone
  • 1ère plate forme de blog en Europe avec 10 million de blogs / 450 millions d’articles / 1290 millions de commentaires
  • 15ème site au monde en pages vues (et 1er site francophone en pages vues)
  • 150ème site au monde en visiteur unique.
  • Le CA de la publicité issue de l’internet (16M euros) a dépassé en 2006 le CA de la publicité issue de la radio (14Meuros).

(3) Andrew Keen, « The Cult of the Amateur », Nicholas Brealey Publishing, 2007.(2) Interview à « Libération » du 22 août.

(4) Article de Pierre de GASQUET, journaliste au service Enquête des « Echos »

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L’essence du mal – conférence de Pierre Terzian

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Jérôme Bondu

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