Skip to main content
Intelligence Economique

Histoire de l’IE (1/8): Sun Tzu

By 8 octobre 2008juillet 2nd, 2022No Comments
Sun Tzu

Jean-Pierre Bernat est intervenu le 23 septembre au Club IES pour une conférence sur l’historique de l’IE. Il nous a laissé la liberté d’utiliser son texte.  Compte tenu de sa taille et de sa densité, je vais le poster en 8 parties :

  1. Histoire de l’Intelligence économique (1/8): Sun Tzu 
  2. Histoire de l’IE (2/8): Attila et la ligue hanséatique 
  3. Histoire de l’IE (3/8): Le Japon et Venise 
  4. Histoire de l’IE (4/8): De Richelieu à Bonaparte
  5. Histoire de l’IE (5/8): L’Angleterre victorienne
  6. Histoire de l’IE (6/8): Mao et la stratégie chinoise
  7. Histoire de l’IE (7/8): La guerre de l’info
  8. Histoire de l’IE (8/8): L’hyper connectivité

Bonne lecture

Jérôme Bondu


Petite histoire de l’intelligence économique – Évolution de la stratégie au fil du temps ? 1er partie

Par Jean-Pierre Bernat

Chargé de mission « veille stratégique »

Délégation à la Valorisation de la Recherche

CIRAD – Montpellier


L’intelligence économique (et ses nombreux avatars) semble avoir enfin pris racine dans notre culture nationale et, passant du « Rapport Martre » au « Rapport Carayon », elle entre d’une phase descriptive et prospective dans une phase structurante et proactive.

Dès lors apparaît la question logique :

A quand remonte le concept même d’intelligence économique et qui peut logiquement en revendiquer la paternité?

Si pour ce que nous conviendront d’appeler « l’intelligence économique moderne » par référence à la maintenant célèbre définition du rapport Martre il semble que la réponse soit relativement simple à formuler. On trouve en effet trace des premières considérations sur l’importance de l’information de type décisionnel dans les travaux des économistes américains comme Peter Drucker ou J.F Rockart vers le milieu du siècle passé (plus précisément vers les années 70).

Elle semble beaucoup plus ardue pour ce qui est de la philosophie même de la décision stratégique, puisque force est de constater que l’application au monde de l’économie, et plus particulièrement à celui de l’économie industrielle, elle constitue une application des théories militaires sur la notion de l’utilisation stratégique de l’information comme facteur visant à réduire un risque et par là comme outil d’accompagnement d’une tactique basée sur le mouvement.

Sun Tzu : l’ancêtre commun

A tout seigneur, tout honneur, on ne peut aborder le monde de l’intelligence économique sans entendre parler de Sun Tzu (parfois orthographié Sun Zi, voire Sun Tsé), et de son ouvrage de référence « L’art de la guerre » dont la principale traduction française est due à Jean-Jacques Amiot.

Une réflexion sur la guerre pris naissance à l’époque chinoise des « royaumes combattants » (Ve-IIIe siècles avant Jésus-Christ). Parmi ceux-ci le plus ancien semble être un manuel de stratégie rédigé en « treize articles » (comprendre chapitres) rédigé vraisemblablement entre les Ve et le IVe siècle et attribué à un certain Sun Tzu. Très tôt ce texte fut à l’origine de nombreux commentaires, résultat de sa notoriété. Cette notoriété s’étendit au Japon, en Corée, pour atteindre la France en 1772 grâce aux travaux du jésuite sinologue le Père Amiot.

Traitant de la guerre de conquête, Sun Tzu y développe des embryons de théorie dans lesquels il est dit que la guerre n’est pas le fruit du hasard ou de la fatalité mais un processus qui évolue en fonction du seul rapport de force qu’il met en jeu. Le déroulement d’un conflit obéit alors à une nécessité interne qu’on peut logiquement prévoir, donc parfaitement gérer. Cette gestion se fonde sur une utilisation rationnelle et économe des troupes.

Selon Sun Tzu, pour soumettre l’adversaire il faut une combinaison de ruse, de surprise et de démoralisation, d’où l’importance de la guerre psychologique, des rumeurs et de l’intoxication afin de susciter le désordre et la confusion chez l’ennemi.

Le point fort de cette pensée stratégique est de réduire au minimum l’engagement armé (coûteux et aléatoire) en travaillant au niveau d’un stade antérieur à la détermination des événements ? l’idéal étant de vaincre sans avoir à engager le combat!

On y voit les prémices de l’analyse des signaux précoces d’alerte.

Quelques retombées asiatiques de l’approche de Sun Tzu

On doit tout d’abord citer « Le Tao du Prince » qui réunit les oeuvres du philosophe chinois de IIIe siècle avant notre ère, Han Fei, et qui est l’un des textes les plus importants de l’histoire de la pensée politique chinoise et sans doute mondiale. Il se place aux cotés des grands classiques que sont « la République » de Platon ou « Le Prince » de Machiavel.

Le programme qu’il contient a été appliqué à la lettre par un empereur, Qin Shihuang qui régnât au IIIe siècle sur un territoire aussi vaste que l’Europe. Dans le même esprit, mais de façon un peu plus tardive, on note que, selon la coutume, en Chine lorsque les dieux veulent aider un mortel qui a eu l’heur de leur plaire, ils lui offrent parfois un livre de stratégie.

Les « Trente-six Stratagèmes » en font partie. Ils résument les principes essentiels de l’art politique chinois. Organisé en six recueils consacrés à chaque type de batailles : offensives, indécises ou même perdues ; il sert également de guide dans le labyrinthe de la vie quotidienne et dans toutes les situations de conflit. Cette petite encyclopédie composée sous la dynastie des Ming (1368-1644) fut retrouvée par hasard en 1941 dans la province de Shaanxi, et, après avoir été interdit par Mao Zedong, ce livre est devenu dans les années 70 un best-seller, utilisé comme manuel de stratégie dans le monde des affaires et comme bréviaire de l’art de vivre.

Jean-Pierre Bernat

Informations complémentaires…

Nota Bene a par ailleurs réalisé une excellente vidéo au sujet de Sun Tzu.

Leave a Reply

Clicky