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A lire : Influence et manipulation de Robert Cialdini 1/2

By 17 septembre 2022No Comments
Influence et manipulation

J’ai lu et beaucoup apprécié « Influence et manipulation » sous-titrée « l’art de la persuasion » de Robert Cialdini. Je publie une note de lecture en deux parties (lire la seconde partie).

Je précise comme à chaque fois, que cette note de lecture n’est ni résumé ni une synthèse, mais plutôt une incitation à acheter et lire l’ouvrage. Cette note n’engage que moi. Les phrases entre guillemets sont de l’auteur. Il existe de nombreux résumés du livre, cette prise de note est plus pour moi un exercice de mémorisation. « Influence et manipulation » est publié chez Pocket.

Influence et manipulation

Cet ouvrage fait incontestablement penser au Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens de Joule et Beauvois et au Manuel d’autodéfense intellectuelle, de Sophie Mazet. Il y a aussi des messages communs avec le livre de Gérald Bronner Apocalypse cognitive  Démocratie des crédules, et Sébastien Bohler avec la maitrise de son striatum ont le même raisonnement. L’ouvrage original a été écrit en 1984, mais j’ai lu la version 2004. Il y a quelques longueurs et les exemples sont parfois un peu vieillots. Cela mis à part, l’ouvrage est très intéressant.

1 – Les armes de l’influence

Robert Cialdini présente d’abord le cas d’un animal qui réagit de façon « primaire », stéréotypé, à un stimulus. Et il explique que les Hommes ont développé une réflexion très élaborée qui nous distingue de ces animaux. Mais, ajoute-t-il, nous vivons dans un monde complexe, changeant, remplis de stimuli…. Et que de ce fait, à l’instar des autres animaux, nous prenons des raccourcis mentaux, et nous agissons nous aussi de manière primaire et stéréotypée. « Au fut et à mesure que les stimuli que nous rencontrons quotidiennement deviennent de plus en plus changeants et complexes les raccourcis nous sont de plus en plus nécessaires ». Il faut donc connaitre ces raccourcis, ne serait-ce que pour éviter d’être vulnérable face à des manipulateurs.

2 – La réciprocité

La manipulation par la réciprocité
La règle du donnant donnant est très puissante. Elle peut être exploitée par exemple en nous donnant un élément qui a peu de valeur et en demandant en retour un élément qui en a plus. Elle se matérialise par exemple quand on reçoit un échantillon gratuit. « Une petite attention initiale peut créer un sentiment d’obligation assez fort pour faire consentir une faveur nettement plus importante ». Une variante de cette opération vise à faire une concession (et non plu un cadeau physique) qui va permettre d’obtenir en retour une autre concession. Celui qui est manipulé a de surcroit le sentiment d’être responsable de l’accord qu’il a donné, et en retire une forme de satisfaction factice.
Explication : L’explication de ce phénomène réside dans le fait qu’il est désagréable d’être l’obligé de quelqu’un et que nous cherchions rapidement à nous défaire de cette dépendance.
Exemple : Robert Cialdini donne en exemple le scandale du Watergate. Si l’équipe de Nixon, composée de personnes intelligentes et censées ont accepté un plan aussi « stupide », c’est que le promoteur du cambriolage avait déjà fait plusieurs concessions. Et que son dernier plan avait été accepté en gage de concession réciproque (p71).
– Comment lutter contre la réciprocité ? « Le véritable adversaire, c’est la règle. Si nous ne voulons pas en être les victimes, nous devons trouver les moyens de la contrecarrer ». En l’occurrence, on pourrait expliquer verbalement à celui qui fait un don ou une concession que nous ne nous sentons pas liés, ou que nous l’acceptons sans contrepartie.

3 – Engagement et cohérence

« Dès que nous avons pris position ou opté pour une certaine attitude, nous nous trouvons soumis à des pressions intérieures et extérieures qui nous obligent à agir dans la ligne de notre position première : nous réagirons de façon à justifier nos décisions antérieures. » Le problème est que le souci de paraitre cohérent va fournir aux exploiteurs un levier de manipulation qui nous fera agir, y compris contre nos intérêts. La cohérence d’une personne est socialement très valorisée, et associée avec des qualités comme l’intelligence et la force de caractère.
Explication : Comme la réciprocité, la cohérence a ses avantages, à savoir l’économie de réflexion.

Achats de Noël

Exemple : Robert Cialdini présente le cas des achats de Noël. Les fabricants de jouets font avant Noël une grosse campagne sur un produit. Ce dernier est réclamé pour nos enfants, et nous nous engageons à l’acheter. Mais les fabricants organisent ensuite la pénurie factice de ce produit. Ce qui nous oblige après Noël à retourner au magasin pour lui acheter, nous respecter notre engagement (p101). Cela me rappelle furieusement ce qui s’est passé avec les toupies Beyblade !
– Robert Cialdini évoque aussi longuement le système des camps chinois durant la guerre de Corée, et des lavages de cerveau des prisonniers américains. Les premières concessions obtenues auprès des prisonniers sont toujours très modestes (par exemple, de reconnaitre que tout n’est pas parfait dans le système politique aux États-Unis). Ce premier engagement sera ensuite rendu public au sein du camp, et permettra d’autres concessions. La publicité de l’engagement au sein du camp joue un rôle important, car cela qui est en l’auteur aura ensuite besoin de conserver sa position par cohérence. Un acte écrit demande plus d’effort, et plus l’effort est important, plus l’engagement est durable (p107). L’auteur notamment fait référence au système de pied dans la porte.

Rite de passage chez les Thonga

– Robert Cialdini recherche ses exemples d’influence et manipulation dans d’autres cultures. Il cite le cas des bizutages et du rite de passage chez les Thonga de l’enfance à l’adulte. Les épreuves pour réussir donnent de la valeur au passage. « Les futurs membres de la société estiment davantage leur appartenance au groupe ». Plus les changements sont intériorisés plus ils seront forts. « Les vendeurs ont compris qu’un engagement personnel était capable de bâtir ses propres fondations constituées de tout un système de nouvelles justifications à l’engagement ».
– Comment lutter contre ? « La cohérence malavisée est le démon des petits esprits » a dit Ralph Waldo Emerson. Il faut se fier à notre ressenti : le ressenti que l’on nous fait accepter quelque chose contre notre gré. Il faut verbaliser auprès de la personne qui est en train de nous manipuler le fait que nous ne soyons pas dupes pour rompre la logique d’engagement. Robert Cialdini fait paradoxalement beaucoup appel au ressenti, et parle de sentiment « du fond du cœur ». « Nous ressentons les sentiments réels pendant une fraction de seconde avant de pouvoir les intellectualiser ».

4 – La preuve sociale – la vérité c’est les autres

Explication : Robert Cialdini commence par une citation de Walter Lippmann « Lorsque tout le monde pense pareil, personne ne pense vraiment ». Et enchaîne avec le système des rires enregistrés que tout le monde déteste, mais qui ont prouvé leur efficacité. Même totalement factices ces rires nous font plus apprécier les aspects comiques. Nous nous reposons tous sur les autres pour calquer notre ressenti et notre attitude. C’est le phénomène de preuve sociale.

Sectes influence et manipulation

Exemple : Robert Cialdini développe l’exemple de sectes… naturellement fortes en Influence et manipulation. « En général, lorsque nous ne sommes pas sûrs de nous, lorsque la situation est confuse ou ambiguë, lorsque l’incertitude règne, nous sommes davantage disposés à nous en remettre aux actions d’autrui pour déterminer la conduite à tenir ».

Catherine Genovese

– Il évoque le phénomène « d’ignorance collective » quand chacun, regardant chaque autre, entraine un phénomène d’inaction : personne n’agit dans une situation qui demanderait justement une action. Pour étayer son propos, il raconte l’histoire malheureusement bien connue du meurtre de Catherine Genovese en 1964 à New York (p186). L’agression a duré 35 minutes et il y eut 38 témoins. Mais personne n’intervient. Ce fait divers a montré la force de la dilution de la responsabilité, en même temps que la force de la preuve sociale et de l’ignorance collective « dans lequel chaque individu conclut de l’impassibilité générale que tout va bien. Le danger peut alors dépasser le point où un individu isolé, non influencé par le calme apparent des autres personnes, agirait ». Les villes regroupent des facteurs aggravants, décrit comme des environnements urbains, confus, peuplés et où les gens se connaissent peu. Tout cela diminue les taux d’assistances.
– La preuve sociale est partout présente : Plus il y a d’évocation (par exemple dans les médias) sur les suicides, plus de gens passent aux actes. Plus il y a une large publicité sur des actes de violence, plus cela stimule les homicides imitatifs.
– Comment lutter contre ? connaitre les règles sociales, savoir prendre un recul critique. Et être actif dans la détection des falsificateurs : « nous devrions faire payer aux responsables leur falsification de la preuve sociale ».

Le livre « Influence et manipulation » est très intéressant. Je publie bientôt la seconde partie de ma note de lecture.

(lire la seconde partie de cette note de lecture).

Jérôme Bondu

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Le PDF complet du livre est en ligne.

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